Diriger, c’est conduire un peuple avec son assentiment » / La force sans la justice est tyrannique »
Posté par goalexandre le 24 octobre 2010
c’est de construire ce genre de réforme grâce à la démocratie participative, par et avec les gen
Le conflit autour de la réforme des retraites paraît dans l’impasse. Le gouvernement ne veut plus rien céder, arguant de sa légitimité, née des urnes. Le mouvement social est-il moins légitime que le pouvoir ? *
Le gouvernement actuel méconnaît ce temps de la souveraineté partagée, une valeur pourtant devenue importante.
nous visons une fabrication collective, plurielle, de la raison publique et du pouvoir d’Etat.
L’invention démocratique de demain est là. Elle a un antécédent fort : le serment du Jeu de paume.
Nous devons écrire un nouveau serment du Jeu de paume
http://www.dailymotion.com/video/xfc8hh
Ségolène Royal a dénoncé ce vendredi 22 octobre 2010 au micro de France Inter la volonté de passage en force du gouvernement Nicolas Sarkozy et de la droite :
« Je dis aujourd’hui que le prochain rendez vous c’est en 2012 et qu’en 2012, si les Français nous font confiance, nous leur rendrons la retraite à 65 ans et pour ceux qui ont travaillé depuis longtemps, nous leur rendront la liberté de s’arrêter à l’age de 60 ans.
Parce que ce sont des acquis sociaux et il n’y a aucune raison de reculer sur ces acquis sociaux dès lors que l’on met en place une autre réforme : celle qui consiste d’abord à lutter contre le chômage puisque les besoins des régimes de retraite sont d’abord dus au chômage et donc au manque de cotisations . Deuxièmement, c’est de faire participer les revenus financiers au financement des retraites.
Vous savez, Blaise Pascal écrivait cette phrase dans ses « Pensées » :
« La force sans la justice est tyrannique »
On savait qu’on avait un système corrompu. On sait maintenant qu’on a un système tyrannique avec une volonté de passer en force sur une réforme brutale et injuste. »
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http://fr.wikipedia.org/wiki/Serment_du_Jeu_de_paume
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Le Serment du Jeu de paume
par David, Musée du Château de Versailles
Le serment du Jeu de paume est un engagement d’union pris le 20 juin 1789 à la sal
Le souverain parti, les gardes semblent vouloir disperser par la force les députés du Tiers qui refusent d’obéir. Quelques députés de la noblesse, dont La Fayette mettent la main à l’épée. C’est à ce moment que Mirabeau aurait prononcé la fameuse phrase, dont plusieurs versions existent: « Allez dire à ceux qui vous envoient que nous sommes ici par la volonté du peuple et que nous ne quitterons nos places que par la force des baïonnettes ! » [1]
Le roi capitule. « Eh bien, dit-il, s’ils ne veulent pas s’en aller, qu’ils restent ! » Le 27 juin, il ordonne aux privilégiés des deux autres ordres de se joindre au tiers, en une chambre unique.
anche 24 octobre 2010 7 24 /10 /2010 01:12
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Ségolène Royal sur France Inter et Cynthia Fleury dans « Le Monde »
traversées par la fulgurance d’idées communes :
« Diriger, c’est conduire un peuple avec son assentiment. »
Le Serment du Jeu de paume par David
Il est parfois des fulgurances qui éclairent le ciel d’octobre. Hier, on apprenait que Ségolène Royal, dans une interview accordée la veille à France Inter, soulignait l’importance de construire une réforme durable des retraites « grâce à la démocratie participative, par et avec les gens », citait Pascal – « La force sans la justice est tyrannique » – et concluait en martelant : « On sait maintenant qu’on a un système tyrannique avec une volonté de passer en force sur une réforme brutale et injuste. ». Dans le même temps, Cynthia Fleury, philosophe, professeure et auteure, accordait un long entretien au journal Le Monde (édition datée du dimanche 24 octobre 2010), où elle développait sa réflexion sur la démocratie moderne et la réforme des retraites, expliquant que « le grand challenge des démocraties modernes », c’est de « structurer, organiser, ossifier la démocratie participative », car « la démocratie, ce n’est pas la réciprocité des mépris » entre les citoyens et les élites. Cynthia Fleury parlait de tyrannie, elle aussi :
« Gouverner, ce n’est pas pratiquer l’autoritarisme. Pour cela, il y a les petits chefs, les petits tyrans qui n’ont rien à voir avec l’art de gouverner. Diriger, c’est conduire un peuple avec son assentiment vers des seuils que l’on considère comme des clés pour que la démocratie se renforce. »
Et elle concluait en appelant à un nouveau serment du Jeu de paume : « L’invention démocratique de demain est là. Elle a un antécédent fort : le serment du Jeu de paume. Nous devons écrire un nouveau serment du Jeu de paume. Il ne faut pas avoir peur d’inventer. ».
Retour sur ces deux interventions traversées par les mêmes idées.
F.M.
Ségolène Royal : « Le gouvernement a voulu passer en force et je pense que c’est une corruption de l’esprit de la République. On avait déjà vu la corruption concrète du système Sarkozy. On voit là qu’il y a une corruption des mœurs politiques. Aucun pays moderne ne conduit aujourd’hui des réformes de cette importance contre le peuple. Et au contraire, la condition d’une réforme durable, c’est de construire ce genre de réforme grâce à la démocratie participative, par et avec les gens parce que la retraite, c’est un patrimoine de chaque travailleur et donc le système qui consiste à imposer par un rapport de force une réforme qui est à la fois brutale et injuste est forcément une réforme qui ne durera pas. (…)
Vous savez, Blaise Pascal écrivait cette phrase dans ses « Pensées » : « La force sans la justice est tyrannique »
On savait qu’on avait un système corrompu. On sait maintenant qu’on a un système tyrannique avec une volonté de passer en force sur une réforme brutale et injuste. »
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24 octobre 2010
Cynthia Fleury « Diriger, c’est conduire un peuple avec son assentiment »
Cynthia Fleury (Francesca Mantovani pour Le Monde)
Philosophe, professeur à l’Université américaine de Paris, Cynthia Fleury, 35 ans, enseigne également à l’Institut d’études politiques de Paris et à l’Ecole polytechnique. Auteur de plusieurs ouvrages – elle a publié ce printemps La Fin du courage (Fayard, 208 p., 14 euros) -, la philosophe travaille sur les outils de régulation de la démocratie.
À l’heure du conflit social autour de la réforme des retraites, Cynthia Fleury estime qu’il est urgent de réunir « les différents acteurs publics » afin d’« orchestrer le compromis démocratique ».
Au-delà, la philosophe juge urgent d’écrire un nouveau serment du Jeu de paume et de réinventer la République.
Le conflit autour de la réforme des retraites paraît dans l’impasse. Le gouvernement ne veut plus rien céder, arguant de sa légitimité, née des urnes. Le mouvement social est-il moins légitime que le pouvoir ?
On est dans l’erreur si l’on pense que la démocratie, c’est d’un côté un pouvoir représentatif, seul légitime, et de l’autre côté une foule. Même si le gouvernement affirme qu’il a orchestré la négociation, il ne l’a pas orchestrée jusqu’au bout, c’est-à-dire qu’il a refusé de reconnaître la valeur, la nécessité, la légitimité des acteurs publics que sont les syndicats, les partis politiques, les associations.
Dans les démocraties modernes, il y a d’un côté des citoyens éclairés, des citoyens responsables, et de l’autre des élites éclairées, des élites responsables. On peut estimer que les citoyens ou les élites ne sont pas assez éclairés et jouer à se dénigrer perpétuellement, mais cette attitude ne conduit nulle part. La démocratie, ce n’est pas la réciprocité des mépris.
« La démocratie, ce n’est pas la réciprocité des mépris » : des gendarmes forcent l’entrée de la raffinerie Total de Grandpuits (Seine-et-Marne), bloquée par des salariés grévistes, vendredi matin 22 octobre (REUTERS/Benoît Tessier)
La rue a-t-elle un rôle dans un processus de négociation ?
Qui est dans la rue ? Les syndicats, les partis de l’opposition, les étudiants, les grands corps, les services publics, ce n’est pas une « plèbe », c’est fini ça, ce n’est pas une « foule », ce n’est pas une « masse », ce sont des individus éduqués, organisés, une force de proposition.
Comme l’explique très bien Pierre Rosanvallon, à la suite de Montesquieu, il y a une asymétrie de la souveraineté : une souveraineté positive, qui renvoie au Parlement et au gouvernement, et une souveraineté que certains disent négative, c’est-à-dire la rue, qui gouverne par son pouvoir de veto, son pouvoir de sanction.
Les démocraties adultes s’organisent différemment, surtout avec l’irruption des nouvelles technologies et la part croissante de la démocratie participative.
On essaie aujourd’hui de positiver cette souveraineté dite négative, c’est le grand challenge des démocraties modernes. Elles doivent structurer, organiser, ossifier la démocratie participative, travail qui a déjà commencé. Un nouvel acte s’est ouvert dans l’histoire de la démocratie.
Jean Jaurès à Albi. « Jeunes gens, la vie a extrêmement resserré l’espace du rêve devant vous. » (Dessin de Plantu)
La jeunesse a-t-elle sa part dans ce nouvel acte ?
L’intervention de la jeunesse dans le débat public signe toujours un nouvel acte. Elle bénéficie d’emblée d’une prime dans l’opinion par son charisme, d’un surcroît de représentativité et même d’un surcroît de légitimité parce qu’elle incarne l’avenir et le questionnement sur la pérennité de notre modèle.
Il faut se souvenir du discours prononcé par Jean Jaurès à Albi. « Jeunes gens, la vie a extrêmement resserré l’espace du rêve devant vous. » Partant de cette constatation, il lui rappelle que le grand défi est de « défendre la puissance de l’âme », c’est-à-dire l’impératif d’inventer, en refusant tout mimétisme avec les générations précédentes.
Comment surmonter l’absence de dialogue entre le pouvoir et le mouvement social ?
Si l’on veut en sortir, il faut admettre cette exigence de pluralité et de complémentarité des légitimités. Non seulement on discute, mais on négocie, on recherche ce qu’on appelle le « compromis démocratique ». Il ne s’agit pas d’une décision « amoindrie » par tous.
C’est une décision coconstruite qui assume l’impératif d’invention démocratique. Le gouvernement actuel méconnaît ce temps de la souveraineté partagée, une valeur pourtant devenue importante.
« Gouverner, ce n’est pas pratiquer l’autoritarisme » : texte de La Fontaine, dessin de Chimulus : « L’Arbre tient bon ; le Roseau plie./Le vent redouble ses efforts,/Et fait si bien qu’il déracine/Celui de qui la tête au Ciel était voisine,/Et dont les pieds touchaient à l’Empire des Morts. »
Comment perfectionner le mode de gouvernement démocratique ?
Gouverner, ce n’est pas pratiquer l’autoritarisme. Pour cela, il y a les petits chefs, les petits tyrans qui n’ont rien à voir avec l’art de gouverner. Diriger, c’est conduire un peuple avec son assentiment vers des seuils que l’on considère comme des clés pour que la démocratie se renforce.
La réforme des retraites est un seuil monumental. C’est une réforme structurelle qui aurait demandé peut-être cinq ans de dialogue, la recherche d’un consensus avec les acteurs de l’opposition.
Or le gouvernement pratique une accélération délirante. Quand on entreprend une réforme, il faut toujours s’assurer du degré d’acceptabilité de cette réforme car, sinon, on travaille pour rien.
Que penser alors du durcissement de part et d’autre ?
Le gouvernement emploie les vieilles recettes : usure, déni, mépris, condescendance. Pour un gouvernement de rupture, c’est étonnamment archaïque et conservateur. Tous les pays d’Europe ont été confrontés à cette réforme.
Qu’ont-ils fait ? L’ouverture, la fameuse ouverture ! C’était le moment ou jamais de la pratiquer. On est, depuis 2007, dans un simulacre d’ouverture. Le conflit actuel exige que l’on sorte des simulacres.
Vous pensez que les récentes « affaires » ont à voir avec les protestations qui s’expriment aujourd’hui ?
La question des conflits d’intérêts est fondamentale. La démocratie est un régime de séparation des pouvoirs. C’est comme ça que l’on préserve les libertés. Le conflit d’intérêts, c’est la mort de la séparation des pouvoirs.
Non seulement le pouvoir actuel n’essaie pas de les éviter mais il les provoque. Telle personne qui est trésorier d’un parti politique va diriger le comité de soutien destiné à récolter des fonds pour ledit parti et, comme par hasard, sera également ministre du budget.
On pointe ainsi la cacophonie et l’incohérence des rythmes sarkoziens, déchaînés sur les réformes et laxistes sur les conflits d’intérêts. C’est pour cela que les gens descendent dans la rue alors qu’ils sont d’accord sur la finalité : réformer notre système de retraites.
Quels pourraient être les contours d’une réinvention de la démocratie ?
Mon travail consiste à réfléchir aux nouveaux outils de la régulation démocratique, à ces fabrications collectives de l’exemplarité. Que vise-t-on ? Pas « le pouvoir au peuple », cher aux populistes, pas la tyrannie de la majorité, chère aux conservateurs, non, nous visons une fabrication collective, plurielle, de la raison publique et du pouvoir d’Etat.
Sarah Palin lors d’un meeting organisé par le mouvement Tea Party à Reno, le 18 octobre 2010 (AFP/Spencer Platt)
Pourtant, on constate en beaucoup d’endroits une droitisation de la vie publique, les Tea Parties aux Etats-Unis, la montée des populismes et de l’extrême droite en Europe, qui paraît loin de cette « fabrication collective » que vous appelez de vos voeux.
Renouveau populiste, renouveau conservateur, renouveau religieux, ces faits sont réels. Mais ce n’est pas parce que ça se passe que c’est vrai, au sens platonicien du terme. Le renouveau du thatchérisme, posture politique ringarde, ridicule, vieille déjà, serait l’intelligence moderne de la démocratie ? Je tombe des nues. C’est l’antithèse de la modernité démocratique.
Qui peut réinventer la démocratie ?
Je crois aux majorités qualifiées citoyennes qui peuvent se mettre en place, par exemple, par les réseaux sociaux. La nouvelle démocratie, c’est peut-être cette apparition de majorités qualifiées dans le débat public, qu’il s’agisse de syndicalistes, de professeurs, etc.
Prenons l’exemple de l’Appel des appels, lancé par Roland Gori. Une personne seule, un psychanalyste, voit tout d’un coup que des processus délirants d’évaluation managériale sont en train de tuer les services publics.
Il prend position, construit l’Appel des appels et, avec d’autres, comme Barbara Cassin, directrice de recherche au CNRS, ou encore Jacques-Alain Miller, psychanalyste, réunit d’abord 200 signataires, puis 200 000, et, aujourd’hui, ce mouvement traverse les services publics, les hôpitaux, la justice, l’école, etc.
Nous sommes en retard sur ce que Jacques Delors avait appelé « la société civile organisée ». Cela nous force à nous interroger sur la manière de faire des montées en généralité pour construire un Etat qui ne soit pas la somme de corporatismes.
Le serment du Jeu de paume du 20 juin 1789, haut-relief en bronze de Léopold Morice, Monument à la République, Place de la République à Paris, inauguré le 14 juillet 1883
Comment fait-on du collectif légitime ?
C’est pour cela que je parle de majorités qualifiées citoyennes. Une caste ou une technocratie ne peut pas s’approprier la démocratie. On a beaucoup trop technicisé la démocratie. Or elle n’est pas une affaire de professionnels de la politique, elle a aussi un lien ancien avec les humanités. Il faut prendre le temps de travailler à de nouvelles méthodologies de gouvernement sans tomber dans la novlangue de la « gouvernance ».
L’invention démocratique de demain est là. Elle a un antécédent fort : le serment du Jeu de paume.
Nous devons écrire un nouveau serment du Jeu de paume. Il ne faut pas avoir peur d’inventer. Comme le disait Héraclite : « Si tu ne cherches pas l’inespéré, tu ne trouveras rien. » Je préférerais que nous ne sachions pas où nous allons parce que nous sommes en recherche d’invention plutôt que de savoir très bien où nous allons : dans le mur, parce qu’on ne produit pas d’invention.
Propos recueillis par Olivier Schmitt
Publié dans conseil municipal, Democratie, Elles et ils chantent la Liberte, Europe, Intelligences collectives socialistes, International, Local, Poésie, Politique, Ségolène Présidente en 2012, Société | Pas de Commentaire »